Publiée le 2 mai 2023

Actualité

Doc du mois : 1848 – Abolition de l’esclavage

Brouillon d'une lettre rédigée par les représentants de la Chambre de commerce de La Rochelle relative à "l’acte d’émancipation immédiate des esclaves".

© FRAD017_41ETP745
Le document du mois est un brouillon d’une lettre rédigée par les représentants de la Chambre de commerce de La Rochelle, adressée à M. Bethmont, ministre de l’Agriculture et du Commerce, le 17 mars 1848, relative à "l’acte d’émancipation immédiate des esclaves".

Le 27 avril 1848 est signé et publié le décret d’émancipation portant sur l’ensemble des colonies françaises. Il affirme que "l’esclavage est un attentat contre la dignité humaine". Cette abolition est pour le gouvernement non négociable et immédiate.

Cette lettre est conservée aux Archives départementales de la Charente-Maritime, dans le fonds de la Chambre de commerce et d’industrie, Série F  – Rapports, avis et vœux sur les questions sociales et économiques (41 ETP 745).

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Consultez le brouillon de la lettre

"Une vive et profonde sensation"

La lettre porte sur "l’acte d’émancipation immédiate des esclaves" dans les colonies françaises et donne un éclairage sur les réactions des membres de la Chambre de commerce. Pour être plus précis, la lettre est rédigée en réaction à la création, par arrêté du 4 mars 1848, de la commission mise en place par le gouvernement provisoire de la IIe République et chargée de préparer l’acte qui "a produit (…) une vive et profonde sensation".

En effet, le 17 mars 1848, les membres de la Chambre de commerce se réunissent pour discuter du futur décret et décider des remarques et avis qu’ils formuleront auprès du ministre.
Les représentants des marchands et négociants de La Rochelle ne sont pas opposés à cette mesure mais ils souhaitent indiquer au ministre les conséquences qu’ils perçoivent à la signature, non préparée, de ce décret. Mentionnant les révoltes de 1790-1794, ils font référence à des conséquences désastreuses de la 1ère abolition (1794) et à un manque d’anticipation du gouvernement, notamment en ce qui concerne la question de l’indemnisation des propriétaires. La liberté des esclaves n’est nullement remise en cause, c’est la question économique qui préoccupe : risque de "crise profonde qui entraînera la ruine des planteurs et des commerçants, la destruction du commerce avec la métropole (…) et peut-être aussi, comme cela est arrivé pour Saint-Domingue, la perte complète pour la France de ces établissements coloniaux (…)".

Il s’agit là du point de vue officiel de la Chambre de commerce en 1848. Outre le brouillon de la lettre adressée au ministre, les Archives départementales conservent également la délibération de la séance du 17 mars transcrite dans le registre manuscrit des délibérations de la Chambre de commerce et d’industrie de La Rochelle (Série C – Procès-Verbaux des séances. 1840 - 1849, 41 ETP 376) et la transcription de la lettre dans le registre manuscrit des correspondances, équivalent du « chrono administratif » actuel (Série E – Registres manuscrit de correspondance au départ. Copie de lettres et mémoires avec répertoire, 41 ETP 574).
Cette lettre et ces registres de la Chambre de commerce sont une vision partielle des réactions de cette époque. D’autres sources, seraient à explorer, comme les archives privées. Il faudrait par ailleurs mettre en perspective les réactions rochelaises de cette période avec celles des autres Chambres de commerce en France, en particulier celles des villes portuaires.

Les négociants rochelais du milieu du XIXe siècle semblent toutefois déjà tournés vers d’autres territoires et d’autres économies.

Une institution en transformation

Créées au début du XVIIIe siècle, les Chambres de commerce ont un rôle principalement consultatif. Elles sont chargées de donner des avis sur toutes les décisions concernant le commerce par la rédaction de mémoires, de requêtes ou de propositions, remontés auprès de l’administration centrale et du gouvernement.
Leurs membres sont issus des familles de marchands et de négociants influents des villes où elles sont installées. Singularité rochelaise, depuis sa création en 1719, protestants et catholiques se partagent la présidence de la Chambre de commerce.

En 1848, le président de la Chambre de commerce de La Rochelle est le premier qui ne soit pas apparenté aux grandes familles rochelaises. Il s’agit de Pierre-Joseph Michel (1784-1868), originaire de Paramé (Saint-Malo, Bretagne). Il s’installe à La Rochelle où il est consignataire de navire, en particulier pour les navires faisant la grande pêche de la morue à Terre-Neuve. Il est président de 1831 à 1843 et de 1847 à 1867.

Au milieu du XIXe siècle, l’économie maritime rochelaise est déjà tournée vers d’autres activités. Elle se transforme et se modernise : reprise d’activités avec le développement du commerce de la houille, de la pêche, des conserveries de thon et de sardines, des sècheries de morue, construction du second bassin à flot, arrivée du chemin de fer favorisant la connexion entre l’arrière-pays, le port et le trafic maritime.

À faire

Exposition Le décret d’abolition de l’esclavage – 1848
En ce moment aux Archives départementale à La Rochelle
du 3 mai au 7 juillet 2023  
Entrée libre et gratuite
Du lundi au vendredi, de 9h à 12h30 et 13h30 à 17h30. 

Expo dossier "Abolitions"
Les Archives départementales s’exposent au Musée du Nouveau Monde de La Rochelle
museedunouveaumonde.larochelle.fr